Monsieur Michel Leroux est décédé ce dimanche 10 Mai font savoir les sources proche de sa famille à l’âge de 87 ans. Son corps est gardé à la morgue de l’hôpital général de Matanda en attendant le programme de son inhumation.
Découvrez sa biographie à travers cet article publié en 2013 par le Journal Ecole Kengele paraissant à Butembo.
Michel Leroux est devenu un vrai bubolais (Habitant de Butembo) depuis son arrivée à Butembo en 1952, à environ 300 km au Nord de Goma, dans l’est de la RDC. Il est content quand on l’appelle «africain» et adore donner des conseils de sauvegarde de la culture locale. Très attaché à la solidarité africaine, son amour pour la terre et sa facilité à s’intégrer auprès des paysans lui ont permis de se faire beaucoup d’amis.
Agé de 80 ans, marié et père de cinq enfants dont trois avec une femme Nande (il aime le préciser), Michel Leroux est un blanc français très connu pour son langage humoristique et ses calembours (des jeux des mots du Kinande au français). « Butembo = But aime beau », aime-t-il clamer. Avec sa longue barbe blanche, gibecière suspendue à l’épaule, T-shirt enfilé, mocassins faits de pneus, Michel Leroux est un blanc spécial. Il était parti en France avant de revenir encore au Congo, et précisement à Butembo. « Il fallait revenir au continent pour redorer l’image du blanc ternie durant la colonisation », s’explique-t-il.
«Appelez-moi aussi Africain »
Préparé par ses parents pour devenir prêtre, le jeune Leroux voit naître en lui des ambitions d’agriculteur et éleveur lorsqu’il rencontre son oncle, qui vivait déjà au Nord Kivu, en 1952. Après quatre années passées dans un séminaire en France, son pays d’origine, Michel Leroux rejoint Gilbert Aimé, son oncle maternel à Butembo, à 300 km au Nord de Goma, dans l’est de la RDC. Il n’a alors que 17 ans. Son oncle Gilbert s’intéressait aux cultures des légumes et à l’élevage des petits bétails. Cette passion emporte son cœur. Adieu la prêtrise. Il se convertit à la vie paysanne.
Avec la vague des indépendances, il découvre que l’homme blanc se distingue dans la ségrégation raciale. Cette période l’a écœuré. Les fermes de son oncle sont vandalisées par ses anciens ouvriers. « Nous avions abandonné nos plantations, fuyant des tensions. Nous sommes allés jusqu’en Afrique du Sud. Mais là aussi régnait l’apartheid et ses affres. Les occidentaux doivent se condamner pour le manque de respect de la dignité humaine en Afrique », regrette-t-il.
En 1963, Michel Leroux décide de regagner la France. N’ayant pas de diplôme, il se lance dans le commerce du carburant. Sept années dures qui vont lui rappeler l’Afrique. L’Afrique qu’il regagne en 1970. « Ce qui me rattache plus à l’Afrique c’est cette solidarité, cet humanisme… La personne humaine a encore une grande valeur, est au centre de tout », explique-t-il. Leroux est toujours fier d’être appelé africain. « J’ai plus de 65 ans de vie en Afrique. Pourquoi ne pas m’appeler aussi africain », exige-t-il, sourire aux lèvres.
Retourner en Europe ? Ce n’est pas à l’ordre du jour en tout cas. Il appelle ses amis européens de venir découvrir le paradis africain, et de ne pas trop croire aux messages diffusés dans la plupart des médias qui dramatisent les situations des guerres du continent.
Très attaché à la terre
Partout où il passe, Leroux appelle les hommes à ne pas oublier leurs coutumes et cultures locales (religion, médecine, nourriture, habillement, philosophie). Il a même construit des huttes à Mavono (environs 6 km à l’est de Butembo, sur la route Isale-Bulambo). Il prodigue des conseils sur l’importance de consommer les légumes, des plantes, des feuilles aromatiques… dans la médecine traditionnelle et même sur l’importance de la sage-femme. On l’a même taxé de féticheur.
L’oncle de Leroux avait acquis des terres mais ces dernières ont été spoliées. Ce qui l’inquiète. A Kyavaranga, par exemple, une localité située en territoire de Béni, Leroux comptait installer une ferme pour les prisonniers. Ce projet visait à initier des détenus à l’agriculture et à l’élevage qui pourraient les aider à trouver de la nourriture et leur permettre de s’acquitter des amandes. Ce terrain aurait été également spolié. Seul Mavono reste son champ d’activités. Actuellement il y encadre des jeunes désœuvrés dans le domaine de l’agro-pastoral.
Claude Sengenya/Kengele N°32
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