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Série des journées ville morte à Butembo : le pouvoir étatique n’est pas dans la rue, plutôt entre les mains des nouveaux acteurs (Prof Muhesi)

Série des journées ville morte à Butembo : le pouvoir étatique n’est pas dans la rue, plutôt entre les mains des nouveaux acteurs (Prof Muhesi)

Le pouvoir étatique en ville de Butembo est visiblement passé entre les mains des nouveaux acteurs. Ainsi répond le professeur Augustin Muhesi à ceux qui s’inquiètent de l’inaction de l’Etat face à la situation des grèves continuelles en ville de Butembo caractérisée par les grèves.

Depuis jeudi 15 avril 2021, les organisateurs de la série des journées ville morte pour exiger le retour de la paix et le départ de la Monusco ont demandé aux opérateurs économiques, aux opérateurs privés, aux écoles et universités et à tous les autres, de rouvrir leurs activités fermées 10 jours durant. Mais un groupe des jeunes qui distillent des messages dans les réseaux sociaux, souvent anonymes ou avec des noms d’emprunts, passent le matin, aux heures d’ouvrir les boutiques pour mettre en garde tous ceux qui tenteront d’ouvrir leurs portes. Prudence oblige, les portes sont fermées et les activités ainsi paralysées. Le professeur Augustin Muhesi, enseignant à l’Université Catholique du Graben et chercheur dans les questions de gouvernance, estime que cela est un signe d’un pouvoir étatique passé entre les mains des nouveaux acteurs de la société civile qui s’arrogent anarchiquement le droit de décider de paralyser les activités dans une ville ou de poser impunément n’importe quel acte préjudiciable.

‘‘ On a constaté ces derniers temps à Butembo et même dans les autres entités du grand nord de la province du Nord Kivu, que l’Etat n’est plus le seul à jouir du monopole de la violence légitime. La violence devient malheureusement l’apanage des groupes que j’appelle nouveaux acteurs de la société civile, qui peuvent imposer ce qu’ils pensent à tout le monde et l’Etat ne réagi pas. Ils peuvent donner des ordres à tout le monde qui affectent à la fois les services de l’Etat et ceux des particuliers. C’est ce phénomène là que je suis entrain d’observer et d’étudier. Traditionnellement c’est l’administration publique et toute la structure politique qui est détenteur du pouvoir d’Etat. Et en vertu de ce pouvoir seul l’Etat peut donner des ordres visant l’adhésion obligatoire de tous. Les particuliers ne peuvent obliger tout le monde quel que soit le but fondé ou non de leur action. Autrement c’est de l’anarchie. Et comme ça dure, on est tenté de penser que le pouvoir pourtant d’Etat est passé entre les mains de ces nouveaux acteurs de la société civile.’’, analyse le politologue.

Répondant à la question de savoir si cela ne peut pas être interprété comme étant le sens de la maxime ‘‘Le pouvoir appartient au peuple’’, le prof Muhesi répond que ‘‘le pouvoir appartient au peuple dans la mesure où celui-ci l’exerce à travers un cadre démocratique par des canaux déjà défini d’avance. Il y a des règles du jeu claires par lesquelles le peuple peut décider. Ce qui se passe c’est tout autre chose. C’est même atypique. Que l’Etat ne réagisse pas face aux acteurs investis d’un pouvoir qu’eux même s’arrogent. Ils font une sorte de dictature en obligeant tout le monde en barricadant les routes, ils timorent tout le monde.’’, deduit-il.

Du coté des manifestants, le professeur Muhesi estime que la stratégie fait défaut, et du côté du pouvoir d’Etat, qui devrait s’exercer avec un certain prestige mais dans le respect des normes, il est cependant abandonné, s’indigne le professeur Muhesi.

EMMANUEL KATERI

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